Billes de melon

Y’a plus chiant au monde que d’inviter quelqu’un à diner en vérité ? Je ne crois pas. En fait j’adore ca. Mais comme je suis à peu près persuadée qu’à la moindre incartade, les gens vont me planter des clous dans les yeux et/ou décréter que je suis une vieille merde, la moindre collation dinatoire mother fucker apéro lunchatif me plonge dans une brume abyssale tendance gothique en 4ème B. Je me mets à hanter les forums de Super Toinette, le site où tout le monde a un putain d’avis sur tout, là où des nanas sont prêtes à porter plainte pour diffamation si tu émets la moindre critique sur la recette ultime du Veau Marengo En Papillotes de Haricots Blancs Et Sa Purée de Bigorneaux Au Safran. Et pourtant, dans la crise existentielle du qu-est-ce-que-je-vais-bien-pouvoir-faire-à-bouffer-bordel, ces hystériques aux orifices encombrées de concombres  sont mon espoir et ma lumière. Si Louloutte59 a réussi son fondant au chocolat au coeur de noisette et son coulis de mangue, moi aussi, j’ai la foi, je peux y arriver, j’y crois fort.

Après une nuit sans sommeil et des milliers de post-ils raturés et trempés de larmes de haine, j’ai généralement une vague idée de ce que je vais préparer. Et je pars à la chasse des ingrédients complètement débiles mais parfaitement indispensables pour la réussite de ma mission. Des violettes au sucre, par exemple. Je peux t’assurer que dans toute ma ville, il n’y a pas une seule putain de violette. Au sucre, en sirop, dans les plate-bandes municipales, pas la queue d’une fleur. Et sans elles, c’est tout la mise en place (Top Chef, tavu) de mon déssert qui passe à la trape. Et puis y’a le sketch du boucher. 1,8 kilos de bourguignon pour 4, bien sur que ca me va, et puis comme ca je peux nourrir l’étranger, laisser ma porte ouverte pendant le dîner, ca donnera un thème humanitaire et chic à ma soirée. Mais je dis rien, parce que c’est le boucher, et que j’ai toujours eu un peu peur de cette profession, depuis que j’ai lu Le Boucher justement, un petit bouquin prétendument érotique mais surtout tout à fait traumatisant. Je voudrais pas me retrouver en arrière boutique à me faire farcir d’abats et de merguez, une pomme dans la bouche et les cuisses saucissonnées dans de la crépine.

J’aime me faire du mal, je crois que c’est ça l’explication. Et puis je suis un putain de cliché de personnalité maternante, toujours la cuillère en l’air pour donner la becquée à quelqu’un, de peur qu’il manque ou qu’il en vienne à me haïr dans un stade de dénutrition avancée. Quand j’aurai des enfants, je suis sure que je serai la pire mère du monde avec la bouffe. Ca me fait d’autant plus flipper que mon rapport à la chose alimentaire est déjà bien niqué. Je me sens pourtant capable de prononcer la phrase clé « Mais pourquoi tu manges pas, tu m’aimes pas », qui enverra mes petits klougons consulter un psychiatre pendant environ une dizaine d’années.

9 réflexions sur « Billes de melon »

  1. Cute 🙂 Le genre d’hôte qui te blinde de plats et te propose quand même une ultime petite douceur sucrée avec ton café. Sincèrement préoccupée de savoir si elle t’a assez nourri!

  2. Coucou !
    Mangerais bien avec toi, moi !
    Les diners entre potes sont quand même parmi les meilleurs moments du monde
    Bien à toi

  3. Un fois j’ai fait des pâtes au piment en ayant la main tres tres lourde sur le piment.
    Personne n a rien osé me dire…
    Résultat j’ai filé la tourista a tout le monde…
    Ils sont quand même revenus!

  4. ça te passera avec l’âge, à force d’aller bouffer chez les autres et de bouffer de la m…
    Autrefois j’étais comme toi, maintenant je suis bien calmée… Mais par contre j’ai été nulle avec mes enfants niveau alimentaire. Mon fils cadet qui ne rate pas une occasion de me faire un compliment dit toujours : « tu as raté notre diversification alimentaire » (bon, ils avaient 6 mois, y a prescription non ?!)

  5. Exactement « ça te passera avec l’âge ». C’est ce que j’allais taper quand j’ai vu que Moune m’avait grillé ma réplique… J’étais comme ça aussi… un intégriste de la réception réussie, la Rotschild culinaire, du Bed and Breakfast Michelinisé à grand renfort d’étoile. C’était parfait ou ça n’était pas, ce bien avant que le Dîner le soit (ou pas) sur quelque chaîne télévisée.

    Et maintenant je m’en balance un peu, voire grave… 🙂

    C’est ça de vieillir, notre peau se relâche mais la pression aussi. Comme quoi ça a du bon quelque part.

    Bon par contre sur le côté « Aliment-Maman », je me garderai de toute plaisanterie ou légèreté. Zone danger. Je connais. J’ai comme toi un rapport très personnel avec l’alimentation. Comme une Ferrari (dixit ma psy)… du 300 km /h ou du gros coup de frein… du tout ou rien… comme dans ma vie quoi…

    PS : moi j’habite la ville des violettes… en sucre, en sirop, en parfum, cristallisées,… on transforme de la Violette à tous les étages… si un jour je peux te dépanner… 🙂

  6. Tout l’inverse, ça s’aggrave avec l’âge chez moi, et malencontreusement, ma peau bien loin de se relâcher, se tend.

  7. Toujours aussi sauvage, un grand bol d’air, pas très nourrissant mais efficace.

  8. je suis devenue mère, avec le même rapport à la bouffé biaisé depuis ma naissance, et pourtant, j’arrive, visiblement, à les protéger de ça… ils ont, tous les trois, un put@in de rapport sain avec la nourriture…

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