Bébé dans un coin

Personne ne m’aime. Personne. Ce genre de phrases débiles. Ce truc qui tourne en boucle. Personne. Et je suis seule. Et je m’ennuie. Et j’ai peur. Et personne ne m’aimera. Plus jamais. Pas comme avant. Et je ne suis plus capable. Et je n’ai plus envie. Je n’ai plus la force. Les bras mous, les jambes coupées, le cerveau à l’envers, la sensation tout à fait perverse de se ridiculiser face au miroir, de se laisser tomber. Je m’abandonne, pourquoi faire semblant après tout, pourquoi lutter. Le pathétique de la situation. Le pathos puant de la trentenaire. Le cliché. Je me regarde chouiner et j’ai honte, tellement honte, mais pour quelques minutes encore, un quart d’heure, allez, I’m so tired I can’t really see my breathe, chansons toutes prêtes pour oreilles suintantes de tristesse, si tu tapes suicide dans Spotify, on est des centaines à dégouliner en solitaire, à se bouffer les petites peaux qui font mal juste pour s’occuper, en attendant que ca passe, en attendant que ca cesse.

Dans cet état contemplatif, presque mort clinique, tu regardes les détails de ta main, tu inspectes tes pores douteux, le moindre recoin, la moindre ride, tout est là pour t’achever, les signes avancés de ta déchéance annoncée, tout est bon, checklist complète, donnez moi mes chaussons et ma pipe, je ne bougerais plus jamais. Pourtant les autres, ces enculés, tu les aimes, avec leurs défauts et leurs gueules défaites, leurs capitons et leurs poils, sans te poser de questions, sans penser, tu les aimes parce que ton coeur te dit d’y aller, même les cons, mêmes les chiantes, un peu trop peut-être. Mais toi, pauvre merde, petit tas de gras, qu’est ce qu’on peut y faire, qu’est ce qu’on pourrait envisager, même bronzée, décolorée, ongulée, tu restes avec ta petite poche de misére crasse dans un creux, toujours prête à exploser, putain de pieuvre aux tentacules pleines de merde, tu jongles, tu fais la belle, personne n’est dupe, personne n’aime les clowns tristes, ton maquillage dégouline, remballe toi merde, tu fais honte, tu vaux rien, remballe toi et pose toi là, dans un coin.

Personne ne laisse bébé dans un coin putain. Alors je remballe ma complainte, je change trois fois de vernis à ongles et je change de playlist. Parce qu’une fois qu’on a dit tout ca, une fois qu’on a les doigts en sang et les yeux rouges, on fait quoi ? On fait rien. On pue le chien mouillé d’avoir trop chialé, et rien n’a changé. On se regarde s’user, on recompte les échecs et on entretient la bête du grenier, celle qui fait peur même quand t’es grande, celle qui t’empêche de descendre à la cave dans le noir, ce truc planqué d’enfant effrayé. Je sais pas si on peut la buter, je sais pas si on peut l’attaquer à plusieurs et la décapiter, elle est tenace, cette pute, elle ait tâche sur les plus beaux clichés. Je sais juste l’enfermer assez pour ne plus craindre qu’elle débarque pour tout niquer. J’ai toujours peur. J’ai toujours mal. Et alors ? Toi aussi non ?

9 réflexions sur « Bébé dans un coin »

  1. Souvent, c’est plus simple : ceux qui t’aiment de manière inconditionnelle ne sont pas ceux que tu aimes de manière inconditionnelle. D’où cette sensation de merde, alors qu’en fait, on t’aime quand même.

  2. Moi, la pute du grenier à chaque fois qu’elle se pointe je lui met ça : http://www.youtube.com/watch?v=KylMqxLzNGo. C’es tellement triste. Je l’oblige à l’écouter jusqu’au bout mais je lui donne des mouchoirs hein. Après je lui re-raconte les horreurs et la misère du monde. Effrayée par son nombrilisme elle s’en va. Et elle en met du temps à revenir. Bon des fois il faut qu’en même que je lui propose une petite bière entre copines, une clope et un bout de chocolat (UN bout, j’ai dis).
    Simplement des fois il faut lâcher prise et se foutre de tout…
    Bises.

  3. Moi quand la pute du grenier est là, je lui sers un thé, je lui fais croire que j’ai pas peur, je bluffe un max, comme une reine, une putain de déesse.
    On discute un peu elle et moi et puis je la flingue momentanément, ben ouais, ce genre de pute ça crève pas, ça s’accroche.

  4. Ben jcrois que jvais arrêter de venir ici moi, jme sens beaucoup trop impuissant quand tu fais des articles comme ça, j’ai envie dte croiser par hasard et de réussir à te convaincre sans trop te bourrer la gueule que tu peux grimper sur des arc en ciels plein de lolcats que t’arriveras forcément à en en avoir rien à branler d’être grosse, autant que les gens s’en foutent, que tu vas évidemment trouver un mec qui te plaira et qui kiffera évidemment te prendre dans tous les sens dans toutes les capitales d’europe et que toutes tes névroses aussi vieilles que toi vont forcément s’étioler à force que t’aies plus un moment de bad pour t’arrêter sur elles et sur le bout de tes doigts, mais ça arrivera certainement pas et jtomberai surement encore sur ces articles là où tu fais sortir le pus froidement comme si c’était inévitable qu’il revienne, enfin bref wala koi tro de jean michel empathy samsoule

  5. Je l’appelle la chauve souris cette bête moi… Parce qu’elle m’enveloppe de ses grandes ailes et me plante ses crocs dans la chair, elle injecte un putain de venin qui paralyse et empêche toute pensée cohérente, raisonnable…

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