Un mouvement simple du bassin

C’est simple, tu mets ta jambe en l’air, tu bandes la courroie élastique et tu attends. Normalement, c’est là que tes abdominaux prennent le relais. Et que tu te transformes en moins de dix séances en parfaite nymphette. Oui mais non. Avec moi, ca ne fonctionne pas. D’abord parce qu’il me faut dépenser l’équivalent d’un aller-retour Paris-Istanbul en énergie avant de me pointer dans cette salle de sport. Quand j’arrive à m’y pointer, je suis déjà épuisée, ravagée de trouille à l’idée que la professeur en string rose moulant décide de s’intéresser particulièrement à moi pendant le cours. Qu’elle vienne à côté de moi, avachie tendance baleine sous acide sur mon petit matelas. Parlons en d’ailleurs. Ceci n’est pas un matelas. Ce n’est rien. Un centimètre de rien, qui ne calfeutre en aucune manière les bosses du béton ciré de la salle, ou les lattes de parquet du studio de danse qui s’incrustent une à une dans mes cuisses potelées. Ceci est une arme supplémentaire dans l’escarcelle marketing des sportifs, qui visent à nous faire croire qu’il peut y avoir une donnée agréable dans une salle de sport : un matelas.

J’ai essayé pourtant de faire la course à l’endorphine. Tous mes potes sportifs m’assurent qu’ils reçoivent des décharges magiques de substance à bonheur dès qu’ils finissent de ramer sur leurs instruments de torture préfères. Que c’est mieux qu’un orgasme, que c’est la récompense ultime, un sentiment de bien-être diffus avant l’arrivée des courbatures post-marathon-sur-tapis-roulant. Mon cul. Tout ce que je ressens après un cours de sport, c’est un sentiment de honte ainsi que la nécessité impérieuse d’aller me plonger dans une baignoire pleine de glaçons afin de faire redescendre la température de mon corps gracile, et de lutter contre la couperose momentanée qui envahit mon divin visage. Une fois seulement, après avoir tellement sué et tellement injurié mes voisins cyclistes immobiles que mes jambes tremblaient comme de la gélatine de porc posée sur une baffle en rave party, une fois seulement j’y ai cru, à cet orgasme, à ce tourbillon de bonheur rose et pailleté. En fait j’avais juste la tête qui tournait, et je me suis étalée de tout mon long sur la moquette senteur chaussette du Club Med Gym, sous les gloussements sonores des body-builders du fond de la salle.

Le pire, avec le sport, c’est quand on arrête. On pense ne plus jamais y retourner, pouvoir ranger dans un coin de sa tête ce moment affreux de totale décomposition de toute forme d’estime de soi, et passer à autre chose. Mais non. Le lendemain, le corps endolori et meurtri se rappelle à votre bon souvenir. Après une heure d’abdo-fessiers pour débutants, il m’a fallu 45 minutes pour enfiler mes chaussettes le matin suivant. Des muscles se réveillaient, mon corps hurlait, mes pieds se refusaient à mon cerveau, qui m’ordonnait quand à lui de me recoucher dans l’instant, sous peine de douleurs terribles sur le chemin du métro. J’aurai bien voulu me tonifier le bas ventre et m’arrondir le fessier, me débarrasser des mes ailles de chauve-souris au bout des bras et arriver à faire le poirier. Seulement, rapport à la vie, ca va pas être possible.

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